Salut! Me revoilà avec une
deuxième fic. Je peux vous dire qu’elle m’a donné du mal celle-là, et qu’elle
m’en donne encore!
Mais je serais récompensée de ma
sueur et de mes larmes si vous l’appréciez!
Couple: Sasuke-Kakashi (pour de
vrai cette fois)
Les persos n’sont pas à moi,
Même si j’les voudrais rien
qu’une fois!
(viiiiii! plein de bôs bishô’
rien qu’à moi! — je sais, superbe pléonasme.)
Fic en deux parties. D’hab’, je
mets mes fics en une seule fois, mais là, j’en ai trop marre qu’elle traîne
dans mon ordi sans avoir d’avis de personne dessus. Quant à savoir pourquoi
elle n’est pas encore terminée, allez donc faire un tour à la fin si ça vous
intéresse! ;-P
Dadah!
Spéciale
dédicace à Machan!
Pour me faire pardonner ta
déception lors de ta lecture de “Boire ou dormir” (‘vache, il est vraiment
pourrave ce titre... Quoique celui-ci n’est guère mieux. Je trouve que “Six ans
après” sonne mieux, mais ça me fait trop penser au film. Qu’en dites-vous?) Et
pour te remercier de ne pas m’avoir tapée dessus avec ton maillet de trois
tonnes cinq spécial “vengeance meurtière”! ;-D
Six ans plus tard...
Dans
le village caché de Konoha, c’était la consternation chez les ninjas. Cette
dernière mission avait été un échec total. Même si on l’avait classée dès le
début dans la catégorie “à hauts risques”, personne ne s’attendait à une telle
débâcle. Un mot politiquement correct pour éviter de prononcer celui de
“massacre”. Seuls trois hommes étaient revenus, dont deux grièvement blessés. Le
troisième, une fois rassuré quant à l’état de ses coéquipiers, était allé se
terrer chez lui et n’en sortait que pour répondre aux convocations de l’Hokage.
Au début, seule une poignée de personnes supposèrent que ce jounin avait peur. Puis
la rumeur qui avait commencé à se répandre enfla de jour en jour comme quoi
Kakashi Hatake, le célèbre Ninja Copieur, était un lâche.
Sakura
et Naruto se montraient ouvertement consternés par ces racontars et Gai ne
comptait plus les fois où il avait dû clouer le bec à un péquenot qui insultait
l’honneur de son ennemi de toujours. Sasuke, quant à lui, ne montrait aucune
opinion ni sentiment particulier. Ce qu’on disait sur son ancien professeur
semblait ne le concerner en rien. Jusqu’au soir où il se rendit chez Naruto à
la demande abondamment réitérée de Sakura. Les trois ninjas, autrefois
équipiers, s’étaient réunis afin de mettre au point un plan d’action pour aider
l’homme aux cheveux gris et le forcer à sortir de son apathie. Si le dernier
des Uchiwa était d’avis de le laisser tranquille, ce n’était pas celui des deux
autres.
«Enfin, Sasuke, on ne peut quant
même pas rester sans rien faire! Kakashi-sen.. Kakashi a besoin de notre
soutien, assura Sakura.
— Vraiment? Selon moi, le temps
est le meilleur remède au mal dont il souffre. Le temps et la solitude. Il n’a
pas besoin de nous, ni de personne. Et moins que tout de ses anciens élèves qui
viendraient le narguer de réussir toutes leurs missions alors que lui a si
lamentablement raté celle-ci.
— Tu sais que c’est faux. Primo,
ce n’est pas sa faute si la mission a échoué, deuxio...
— Secundo!
— ... nous savons tous deux à
quel point ça fait mal d’être seul pour traverser ces moments. Parce que moi,
j’ai toujours voulu quelqu’un pour partager mes réussites comme mes échecs. Et
je crois que toi aussi, tu aurais voulu une personne à tes côtés à qui te
confier, rétorqua Naruto.
— Toi peut-être, mais pas moi.
— Il faut juste trouver une
personne adéquate, poursuivit Naruto sans tenir compte des paroles du jeune
homme.
— Oui, sans doute. Parmi nous
trois, seul Sasuke pourrait remplir ce rôle.
— Pourquoi moi? protesta ce
dernier en se tournant vers Sakura.
— Oui, pourquoi lui et pas moi? Ou
toi? renchérit le blond.
— J’en serai incapable, je n’ai
jamais connu rien de pareil. Ces sentiments qu’il doit éprouver, je les ignore.
Toi, fit-elle en regardant Naruto, je ne suis pas sure que tu parviennes à
trouver les mots justes. En fait, je crois que tu ne saurais absolument pas
quoi lui dire.
— Parce que moi, je saurai?
demanda Sasuke, acerbe.
— Sans doute plus que lui.»
répondit la jeune femme.
Le jeune brun jeta un regard en
coin à Naruto.
«Tu as raison sur ce point,
concéda-t-il.
— Hé! protesta le ninja renard.
— Donc, c’est d’accord? Tu iras
trouver Kakashi?»
Sasuke soupira.
«Oui. Bien que je ne sois pas sûr
que cela servira à quelque chose.»
Voilà
comment le ténébreux jounin se retrouva sur le chemin de la demeure de son
ancien professeur. Tout en marchant, les mains dans les poches, il se remémora
sa première et unique visite...
Un
matin, dans un coin de la forêt proche du village caché de Konoha:
«Grrrr!
Kakashi senseï, où êtes-vous?
— Kyaaah! Et dire que je ne me
suis pas lavé les cheveux parce que je pensais être en retard! Dis, Sasuke-kun,
je ne suis pas trop horrible? questionna Sakura qui avait le matin même essayé
un nouveau shampooing parfumé à la violette.
— Nooon, Sakura-chan! Tu es
toujours aussi mignonne!
— J’t’ai rien demandé, Naruto! Alors, Sasuke-kun?
— Pas plus que d’habitude, lâcha
le genin brun en se retournant afin de cacher à ses coéquipiers son sourire en
coin.
— Mer... Merci, Sasuke-kun.» fit
Sakura-dehors tandis que Sakura-dedans, effondrée: “C’était censé être un
compliment, ça?”
«Ras-le-bol! Ouaïe!»
Dans son agacement, Naruto venait
de shooter dans un arbre.
«J’y crois pas! Naruto, tu es en
passe de devenir chuunin et tu te fais mal en tapant dans un tronc? Tu es le
ninja le plus nul que j’ai jamais rencontré.
— Naaaaan, Sakura-chan! C’est pas
ma faute! C’est pasque le senseï m’énerve à toujours être en retard!»
À ces mots, Sasuke avança d’un
pas.
«Sasuke-kun, où tu vas?» s’écria
Sakura qui était passé de nouveau en mode groupie.
Le genin se figea. Il hésita un
instant. Pourquoi répondre alors qu’il n’avait de compte à rendre à personne? Enfin
bon, le concept d’ “esprit d’équipe” commençait à se faire jour dans le sien,
aussi finit-il par répondre: «Je vais chercher le senseï.»
Et il disparut dans un tourbillon
de feuilles mortes.
Naruto et Sakura restèrent
immobiles, stupéfaits.
«Bah, comment il sait où habite
Kakashi...?» bredouilla le garçon.
Hé
oui! Comment notre jeune ténébreux savait où trouver Kakashi-senseï? En fait,
dès qu’il avait eu suffisamment confiance en lui et pu constater les capacités
de son professeur, Sasuke l’avait suivi jusqu’à son domicile. À cette époque,
il avait agi avec pour seule pensée sa sécurité: en ninja pur et dur, il
collectait des informations sur ses alliés comme sur ses ennemis.
Hatake vivait dans un quartier
retiré, au calme, loin du centre-ville. Depuis que Sasuke avait découvert cet
endroit, il aimait y passer de temps à autre, même si cela l’obligeait à faire
un crochet sur le chemin du retour. Dernièrement, ses visites avaient augmenté
de façon inversement proportionnelle à la distance qu’il mettait entre
l’appartement de son professeur et lui-même. Mais d’habitude la prudence et la
décence les plus élémentaires le maintenaient à un périmètre respectable. Ce
jour-là, ce matin-ci, il allait enfreindre cette règle qu’il s’était imposée à
lui-même. Pour la première fois, il monta les escaliers de l’immeuble. Tout
autour de lui était tel qu’il l’avait imaginé. Arrivé au troisième étage, il
trouva la porte du duplex close. Mais bon, on est un génie ou on ne l’est pas! Il
força la serrure sans problème et poussa le battant. Aucun signal d’aucune
sorte, aucun déclenchement intempestif de chakra quelle que soit son origine. Il
traversa les pièces le plus silencieusement possible et parvint à la chambre à
coucher sans avoir été inquiété. Kakashi-senseï avait vraiment une trop grande
confiance en lui-même. À ce niveau, on pouvait même parler de stupidité! Si le
salon s’était révélé clair et bien rangé, cette dernière pièce renfermait un
capharnaüm impressionnant. Du linge trié en tas propre et tas sale formaient
des collines sur les chaises. Des tomes de la prolifique série du Paradis du batifolage, parfois en
plusieurs exemplaires, s’empilaient
sur le sol. Un des murs, celui qui se trouvait au pied du lit, était couvert
d’armes diverses, certaines accrochées, d’autres plantées dans la paroi. À croire
que le professeur ne rentrait que pour dormir et n’avait aucune utilité de son
salon. D’ailleurs, en parlant du lit...
“J’y crois pas! Il est vraiment
en train de dormir?! C’est parce qu’il fait la grasse mat’ qu’il est en retard
à chaque cours?”
Contrairement au reste de la
pièce, et malgré qu’il soit encore occupé, le lit était relativement bien mis. Kakashi
ne devait pas beaucoup bougé la nuit. À la tranquillité de la respiration de
l’homme, Sasuke jugea qu’il ne l’avait pas dérangé et que le jounin dormait
toujours. Kakashi reposait sur le dos, le visage tourné vers l’intérieur de la
chambre, comme s’il boudait les rais de soleil qui menaçaient de le réveiller.
“Alors, voilà à quoi il ressemble
sans son masque. Je ne vois pas pourquoi il s’obstine à le porter, il est
plutôt pas mal. Enfin, c’est ce que se dirait une fille. Ou peut-être justement
que les filles lui ont trop dit et qu’il s’en est lassé.”
Les mains dans les poches, le
garçon s’approcha.
«Kakashi-senseï?» appela-t-il
d’une voix posée.
L’interpellé ne bougea pas d’un
pouce. Le genin s’avança encore plus près et se pencha. Son visage n’était plus
qu’à quelques dizaines de centimètres de celui de son professeur.
«Kakashi-sen...»
Il n’eut pas le temps de terminer
sa phrase: cette fois-ci, l’homme réagit. Il ouvrit des yeux encore aveuglés de
sommeil et sourit, le regard dans le vide.
“Pfff... Il est encore dans son
rêve. Vraiment long au réveil, le senseï.”
Puis il fit un geste auquel
Sasuke ne s’attendait absolument pas. Ce fut une telle surprise pour lui qu’il
en oublia de repousser la main qui s’était posée sur sa joue. Parce qu’il
l’avait repoussée, elle ne l’aurait pas caressé comme ça et un pouce ne se
serait jamais aventuré à lui frôler les lèvres. De même, c’était la surprise
qui lui avait fait ouvrir la bouche. La surprise, et rien d’autre.
“Vraiment pas réveillé...” se dit
le genin, trop choqué pour s’autoriser à penser à autre chose.
Soudain, les yeux verrons se
fixèrent sur lui. Ils s’agrandirent, marquant la stupéfaction de l’homme aux
cheveux gris.
«Sasuke-kun? — L’association de
cette particule aux douces caresses que lui prodiguait son professeur fit
frémir le genin. — Mais, qu’est-ce que tu fais dans ma chambre?»
Puis, comme s’il remarquait tout
à coup ses gestes, il s’interrompit et eut un rire gêné.
«Enfin, je suppose que c’est de
ma faute. Je ne devrais pas arriver à chaque fois en retard à vos cours,
reconnut-il en se redressant et en ébouriffant ses cheveux. Mais, qu’est-ce que
tu veux, on est jeune qu’une fois, et il faut bien profiter de cette jeunesse! Non?»
Sasuke s’abstint de réponse. Il
se détourna du jounin en pyjama bleu ciel et se dirigea vers la porte de la
chambre.
«Je vous laisse vous préparer,
senseï. Je vais rejoindre Naruto et Sakura et les avertir que vous arrivez. Ne
vous rendormez pas, je ne viendrai pas vous chercher une seconde fois.»
Et il sortit.
Sasuke
sourit en se souvenant de sa phrase. Voilà une promesse qu’il aura tenu
longtemps. Six ans pour être exact. À présent, face à l’entrée de l’appartement
de son professeur, il s’apprêtait à la briser.
Contrairement
à la première fois, il n’eut pas à forcer la serrure. La porte n’était pas
verrouillée. Ce manque de prudence consterna le jounin tout en le rassurant sur
un point: ce n’était pas par couardise que Kakashi se terrait chez lui. Il
traversa le salon. Celui-ci n’avait pas changé, hormis le fait que tous les
objets et meubles qu’il contenait avaient été brisés. Le saccage aveugle d’un
homme en colère. Et les traces de sang de quand cet homme s’était blessé.
“Bien, mieux vaut qu’il se
défoule sur le mobilier plutôt que sur ses visiteurs. Surtout lorsque c’est moi
qui lui rend visite.”
Aucun bruit dans la cuisine et
pas plus dans la salle de bain. Il passa la porte de la chambre. Aussitôt, il
fut assailli par l’odeur forte d’une pièce qu’on n’avait pas quitté depuis
plusieurs jours sans pour autant se soucier de l’aérer. Comment son ancien
professeur avait-il pu se laisser aller à ce point? Le jour passait et, malgré
les volets fermés et les rideaux tirés, venait éclairer faiblement la chambre. Dans
la pénombre, Sasuke distingua une masse enfouie sous les draps, dont seule
dépassait une mèche de cheveux gris. Kakashi Hatake.
Le jeune homme demeura indécis. Déjà
qu’au départ il n’était pas chaud pour cette mission, il n’allait pas en plus
le réveiller! Il s’apprêtait à tourner les talons quand une voix rauque
murmura: «Il n’est pas endormi, tu sais?»
Sortant de l’ombre, Pakkun
s’avança vers le jounin.
«Il fait seulement semblant, pour
que tu partes et que tu le laisses tranquille.
— Si c’est ce qu’il veut...»
Et Sasuke de faire un pas vers la
sortie.
«Hé, gamin, tu vas vraiment
repartir comme ça? Sans même essayer de l’aider?
— Je ne serais pas ici si les
deux autres ne m’y avaient pas envoyé.
— Je vois...
— Et toi, que fais-tu ici? Tu ne
peux pas venir dans notre monde sans que l’on t’invoque, il me semble?
— Depuis que Kakashi s’est lié à
nous, il nous invoque chaque nuit pour veiller sur son sommeil. Bon, là, il
fait jour, mais vu son état, j’ai décidé de rester.
— Tu es sûr qu’il est éveillé? Il
nous écoute, donc?
— Oui. Et s’il ne l’était pas, il
l’est sûrement maintenant vu le boucan que tu fais!»
Le jeune homme ne fit pas
attention à une mauvaise foi si insolente. Par contre...
«Qui me dit que tu n’es pas
encore en train de me mentir? Tu viens de le faire à l’instant.
— Moi?
— Tu m’as dit que vous l’avez
veillé chaque nuit, à chacun de ses repos. Pourtant, il y a un matin, voilà six
ans, où vous n’étiez pas là, ni toi ni un autre chien.
— Le matin où tu es venu? Bien
sûr que si, j’étais là! Mais tu ne constituais pas une menace, alors je t’ai
laissé faire. Et puis, de toute façon, ton entrée peu discrète avait dérangé
mon maître. Il était parfaitement réveillé lorsque tu as pénétré dans cette
pièce.
— Pardon?
— Pakkun! Ça suffit! Barre-toi,
disparais!»
Sasuke se tourna vivement vers
l’endroit où la dernière phrase avait été prononcée. Kakashi s’était redressé,
faisant glisser les draps le long de son torse nu. Il avait une barbe de
plusieurs jours, les yeux fatigués et une expression menaçante. Avisant
l’absence d’une chemise quelconque, le jeune brun fouilla plus attentivement la
pièce du regard. Les livres avaient été remplacés par des vêtements qui
traînaient ça et là. Dans la pagaille, un pyjama.
“Attendez, ne me dites pas qu’il
est entièrement... qu’il ne porte rien sur lui?”
Puis, réalisant soudain ce
qu’impliquaient les révélations du petit chien: “Mais, s’il se trouvait
complètement réveillé quand je suis entré dans sa chambre, pourquoi a-t-il agi
de la sorte?”
Il leva les yeux vers le jounin
qui le fixait intensément. Aussitôt celui-ci brisa le silence.
«Alors comme ça, ils t’ont envoyé
me remonter le moral?»
Sasuke acquiesça de la tête.
«Pourquoi toi?
— Parce que j’étais le seul à
trouver cette idée stupide, je pense.
— Mais tu es venu quant même.
— Je les aurais eus tout le temps
sur le dos sinon.
— Dans ce cas, tu peux repartir. Personne
ne t’en voudra d’avoir échoué.
— C’est un défi?
— La meilleure solution pour que
ni toi ni moi ne soyons ennuyés plus longtemps.
— Bof, puisque je suis là...
— Ne me dis pas que te voilà
soudainement décidé à rester?
— Je m’ennuie déjà chez moi. Pourquoi
ne pas voir ce que donne l’ennui de votre compagnie?»
Kakashi hésita un instant. Mettre
ou ne pas mettre cet importun à la porte, là était la question. Mais l’envie
d’agir lui manquait. Il supporterait donc sa présence et espérait que celle-ci
ne le troublerait pas trop. Il n’était pas en état de se contrôler avec autant
de maîtrise que d’habitude. L’homme fit un geste pour se lever et se figea
aussitôt comme le drap le découvrit jusqu’à son bas-ventre. Il saisit vivement
le tissu afin de protéger le peu de pudeur qui lui restait. Le fait qu’il ne
prenait plus la peine depuis plusieurs jours de se vêtir avant de se traîner
jusqu’à son lit lui était sorti de la tête et il ne s’en était rappelé qu’à la
dernière minute. Encore heureux! Il n’imaginait que trop les conclusions que
son ancien élève en aurait déduit s’il s’était affiché devant lui nu comme un
ver! Surtout après les révélations de ce maudit Pakkun. Il tira sur le drap
pour le dégager du sommier et le noua autour de sa taille. Puis il se leva et
passa près de Sasuke en l’ignorant délibérément. Ce n’est qu’une fois au seuil
de la porte qu’il lui dit sans se retourner: «Il y a de quoi faire du café dans
la cuisine. Prépares-en le temps que je prenne une douche.»
Et il sortit.
Une
fois sous l’eau, le jounin aux cheveux gris prit tout son temps: il espérait
que Sasuke comprendrait que le mieux pour tous les deux était qu’il s’en aille.
Mais il n’avait guère d’espoir: l’entêtement des Uchiwa était connu par-delà
les frontières du village.
Et
en effet, le fervent adepte de la ténébrattitude s’obstinait à accomplir une
épreuve de taille: faire du bon café. Il n’avait pas eu trop de mal à trouver
les ustensiles nécessaires, la cuisine étant plutôt bien rangée. Remplir la
cafetière d’eau, ça il savait le faire. C’était après que les choses se
compliquaient: il n’arrivait jamais à trouver les bonnes proportions et son café
se révélait inévitablement une boisson fade vaguement noirâtre ou un brouet
horriblement amer d’une teinte qui aurait rendu un trou noir vert de jalousie. Bref,
il prit son temps, espérant que le maître des lieux sortirait rapidement de
sous sa douche et le libérerait de cette tâche ingrate. Manque de pot, le dit
maître ne semblait pas vraiment pressé de quitter la salle de bains. Arriva un
moment où Sasuke ne put attendre plus longtemps: la situation devenait
ridicule. Prenant son courage à deux mains, il saisit le doseur et le paquet de
café et vida trois mesures dans le filtre en place. Mieux vaut trop que pas
assez, comme on dit. Puis il ferma le couvercle, poussa le bouton et patienta. Pour
tuer le temps et malgré l’heure tardive, il mit la table pour un petit
déjeuner. Cette tâche finie, il patienta encore. Il observa avec attention
chaque objet présent dans la pièce. Cela terminé, il patienta toujours. Il se
remémora les différentes stratégies qu’il avait manigancées et les mit
mentalement face à face avec ce qu’il avait pu voir du ninja. Un Hatake
complètement vide, n’ayant apparemment plus goût à rien, insouciant de son
corps et de ses besoins, totalement obnubilé par sa douleur. Le jounin n’était
pas en état de faire la vaisselle et pourtant il n’y avait nulle trace de
couverts sales. Avait-il réellement cessé de manger depuis son retour de
mission? Il est vrai qu’il lui avait paru plus maigre que d’habitude quand le
drap avait... glissé... le long de son torse. De son torse musclé, pâle, et
plus pâle encore là où de fines cicatrices s’étiraient, blafardes. Le mauvais
côté de la vie de ninja. Mais ces blessures n’étaient rien comparées à celles
qui rongeaient de l’intérieur l’homme aux cheveux gris. Mince, comment un homme
aussi fort pouvait avoir un corps aussi bien proportionné, une silhouette aussi
élancée, des hanches aussi étroites et ce doux cheminement argenté qui menait
jusqu’à ce fruit que le jounin avait défendu de justesse des regards avides du
ninja qui l’observait et qui ne lui aurait certes pas tenu rigueur s’il avait
réagi avec moins de précision quoique cette qualité aille souvent de paire avec
le savoir-faire et que dans un genre bien particulier de...? Sasuke soupira.
Ses pensées s’éloignaient de la raison pour laquelle il était venu ici. À dire
vrai, les paroles de Pakkun l’avaient troublé. Il se connaissait suffisamment
bien et avec assez de lucidité pour ne pas nier qu’il se sentait attiré par son
ancien professeur, et cela depuis plusieurs années. Mais imaginer que cette
attirance pouvait être réciproque... Il se repassa la scène une dizaine de fois
dans sa tête, “afin de chercher des indices” se justifia-t-il. Cependant, au
fond de lui, il savait que ce mobile était l’excuse de sa conscience: son
subconscient lui soufflait une toute autre raison que les réactions de son
corps lui permettaient de moins en moins d’ignorer. Le drap découvrant les
pectoraux, le ventre, cette chair chaude et encore humide de la transpiration
d’un sommeil agité, dépassant le cap du nombril, puis coulant, dévoilant la
toison qui prenait naissance au creux des reins pour poursuivre sa route en des
lieux par lui inexplorés. Le feu qui courait dans les veines de l’Uchiwa, tel
du chakra de lave mêlant puissance et désir, se concentra dans son bas-ventre. Le
ninja brun s’appuya sur la table, les mains tremblantes de convoitise étouffée.
Kakashi passant près de lui, un drap léger protégeant sa vertu de sa seule
présence. Kakashi le frôlant, ne semblant nullement gêné par sa nudité. Alors
que lui... Lui ne pouvant empêcher son regard de venir se nicher dans le creux
de les clavicules, de longer les contours du torse dessinés au fusain,
étonnamment visibles alors que la pâleur de sa peau donnait à l’homme une
apparence fantomatique. Lui se demandant comment le jounin réagirait s’il osait
faire un geste, ce geste, si tentant, ô combien alléchant, de retenir ce drap
maudit tandis que l’homme le dépassait. Ses doigts se crispèrent sur le rebord
de la table au point d’en blanchir leurs articulations et un gémissement roula
dans sa gorge pour y mourir aussitôt. Les ninjas ont l’ouïe fine, il ne
faudrait pas que son ancien professeur vienne à l’entendre. Lui ou un de ses
chiens. Sasuke voyait d’ici la mine consternée de Pakkun devant la stupidité
des humains. C’est alors que le jeune homme remarqua que l’eau s’était arrêtée
de couler.
Kakashi
sortit de sa douche. Il s’essuya et enfila son habituel pantalon bleu marine
ainsi qu’un T-shirt gris molletonné. Puis il se dirigea vers la cuisine où son
ancien élève devait encore être en train de patienter, s’il le connaissait
aussi bien qu’il le croyait. Tout en continuant à frictionner ses cheveux, il
poussa la porte de la pièce. Malgré ses
trois-quarts-d’heure-histoire-de-ne-pas-dire-une-heure-entière passés sous
l’eau, Sasuke était toujours à l’attendre. Cela ne l’étonnait même pas. Par
contre, que celui-ci ne l’ait pas entendu entrer avait de quoi le surprendre. Retrouvant
ses manières sans s’en rendre compte, il mit les mains dans ses poches et
observa le jeune homme avec une curiosité placide. Placidité vite remplacée par
un frissonnement et un intérêt accru quand il le vit saisir la table et en
griffer le bord. Intérêt qui se changea plus rapidement encore en certitude
douloureuse lorsque le ninja sombre se mordit la lève inférieure afin de
retenir un gémissement. L’Uchiwa tentait de réfréner ses ardeurs, ou plutôt une
ardeur pressante et immédiate, ici, devant lui. Kakashi se trouva soudain
ridicule: à cette pensée, il s’était senti rougir. Ridicule et gêné: le rouge
aux joues n’était pas la seule chose qui était monté chez lui. Tout à coup,
Sasuke se tourna vers lui. Le jounin avait l’air au moins aussi confus. Ce
dernier marqua un temps d’arrêt en se retrouvant face à un Hatake encore
couvert d’une buée née de l’eau chaude de la douche. De sa chevelure peu
disposée à être séchée s’échappaient des gouttelettes qui venaient rouler le
long de son cou, suivant le trait de la nuque ou bifurquant au contraire pour
se glisser sous le col et — Sasuke pouvait presque les voir tant il les
imaginait avec force et envie — courir sur le torse pour enfin se perdre dans
des collines abdominales. Une serviette de bain recouvrait sa tête. Un pan de
celle-ci retombait sur son visage, masquant son œil gauche. Depuis que le
jounin brun avait appris comment il se l’était procuré, le senseï était
toujours mal à l’aise devant Sasuke quand il s’agissait de révéler le
sharingan.
«Je suppose que le café doit être
prêt? demanda Kakashi, peut disposé à laisser un silence embarrassé
s’installer.
— Oui. Je vous sers? proposa — à
son propre et grand étonnement — le dernier des Uchiwa.
— Non, laisse. Tu es mon invité. Enfin,
mon visiteur serait un terme plus exact. Alors c’est à moi d’assurer le
service, non, Sasuke-kun?»
L’interpellé sursauta. Cela
faisait longtemps que plus personne n’osait l’appeler ainsi! En tout cas devant
lui.
«Aaah, pardon, Sasuke. Je sais que tu n’es plus le jeune garçon à qui
j’enseignais, mais que veux-tu, les vieilles habitudes ont la vie dure!
— Même à cette époque, je vous
trouvais un peu trop familier avec vos élèves.
— Vraiment? fit distraitement le
ninja en le servant.
— Le terme exact serait “trop
proche”. D’un élève en particulier. En particulier un certain matin, le dernier
où vous êtes arrivé en cours avec plus de deux heures et demie de retard.
— Vraiment...»
Kakashi versait le café dans sa
propre tasse à présent. Et Sasuke eut beau ouvrir les yeux, le liquide ne
trembla pas. Reportant son attention sur le visage amer et calme de son ancien
professeur, l’adepte de la ténébrattitude mit tout son savoir dans un de ces
sourires d’une moquerie acide dont il avait le secret. S’il avait gardé le
regard fixé sur ses mains, il les aurait vu frissonner. Mais Kakashi gardait
une figure impassible.
«Surprenant ce que Pakkun a
laissé entendre tout à l’heure.
— N’est-ce pas? Hélas, la pauvre
bête n’a plus toute sa tête.
— Dans ce cas, la raison pour
laquelle vous avez réagi aussi violemment à ses paroles est?
— Je craignais qu’il ne
t’importune, voyons! Un ninja comme toi n’a pas de temps à perdre avec les
divagations d’un chien sénile, je me trompe?
— Je n’y avais de toute manière
pas prêté attention.
— Et tu as eu raison!» conclut
l’homme aux cheveux gris.
Sur ces bonnes paroles, il porta
la tasse à ses lèvres et but une gorgée. Gorgée qu’il s’empressa de recracher
aussitôt.
«Sasuke-kun! Tu es venu m’aider
ou m’empoisonner?»
Devant l’air froid du ninja,
Kakashi se reprit.
«Bon, d’accord, il n’est pas
absolument imbuvable. Le goût surprend au début, après le palais s’habitue...»
Il ingurgita une nouvelle gorgée.
«... plus ou moins vite.»
Sasuke garda sa moue pincée. Kakashi
reposa la tasse et, posant aussi ses coudes sur la table, se prit la tête dans
les mains. La serviette qui était restée perchée tout ce temps sur son crâne
glissa sur ses épaules.
«Écoute, Sasuke, dit-il d’une
voix fatiguée. J’aimerais que tu partes maintenant. Je ne suis pas en mesure de
recevoir qui que ce soit et je n’ai aucune envie d’être épaulé ou aidé ou
soutenu ou consolé ou je ne sais quel nom vous donnez à ce pour quoi tu as été
envoyé chez moi. Alors, pourrais-tu t’en aller, s’il-te-plaît?»
Sans un mot, le jounin à qui
s’adressait cette requête ultime d’un homme abattu et fier se leva et s’avança
vers la porte. Il attrapa la poignée et se figea, hésitant. Puis il baissa la
tête et sembla se recueillir quelques secondes. Quand il parla, son intonation
fut basse et rauque.
«N’est-ce pas plutôt la peur de
révéler votre faiblesse qui vous fait tenir ce discours?»
Un soupir monta du centre de la
pièce.
«Si c’est ce qu’il te plaît de
croire...
— Quand... quand mes parents sont
morts, assassinés par mon frère, je ne voulais pour rien au monde qu’on puisse
voir à quel point cela me faisait souffrir. Je me sentais doublement coupable:
de n’avoir rien pu faire pour les sauver et de pleurer leur départ d’une façon
égoïste avec la pensée que leur mort m’a marqué plus dans ce qu’elle me
retirait que dans ce qui leur avait été enlevé.»
Kakashi leva la tête et planta
ses yeux dans ceux du jounin. Deux regards, trois sharingan, le tableau était
étrange.
«Sasuke, j’apprécie ce que tu
essaies de faire, mais c’est inutile. Sincèrement, je voudrais te voir partir.
— Et moi, j’ai décidé de rester.
— Sasuke...
— Venez avec moi.
— Pardon?
— Venez avec moi. Nous allons
rendre visite à vos amis.
— Non, Sasuke...
— Et cessez de répéter mon nom
comme ça, ça en devient gênant!
— Vraiment?» demanda le ninja aux
cheveux gris en regardant avec attention le jeune homme.
Celui-ci lui tournait le dos de
nouveau, de façon à ce que son ancien senseï ne puisse pas voir le rose qui
s’était bêtement répandu sur ses joues à cette réflexion stupide.
«Vraiment. Cela pourrait laisser
croire que vous n’avez qu’un mot de vocabulaire.»
Hatake eut un bref sourire
triste. Le dernier des Uchiwa avait fait volte-face juste à temps pour
l’apercevoir. Il s’en autorisa lui-même l’esquisse, un vrai sourire cette fois
et non son rictus habituel, qui disparut aussitôt quand il vit que celui de
l’homme aux cheveux gris s’était évaporé. Le ninja brun s’approcha de lui et se
campa ferme sur ses deux pieds, les poings sur les hanches, dans la posture
appelée “essaie-donc-de-me-faire-bouger-de-là-si-tu-peux” ou plus communément
connue sous le nom du “et-oui-j’ai-décidé-de-t’emm*****-jusqu’au-bout!”
«Senseï, vous allez venir avec moi.
Je ne suis pas homme à répéter les choses deux fois!»
Kakashi sourit involontairement
devant les deux erreurs que son ancien élève avait faites. Sasuke qui essayait
de faire de l’humour, à ses dépends qui plus est! Il ne devait réellement pas
avoir bonne mine. L’homme pivota sur sa chaise afin de faire face au jounin
sans se tordre le cou. Un tel dévouement ne pouvait qu’être récompensé. Et
puis, surtout, le jeune brun ne le lâcherait pas avant qu’il se soit plié à son
caprice. Un petit effort et il serait débarrassé de lui: le jeu en valait la
chandelle! Alors qu’il relevait le front et ouvrait la bouche pour dire qu’il
acceptait, Sasuke se laissa tomber en avant et posa ses mains sur les genoux du
ninja aphasique.
«Al...»
La syllabe mourut dans la gorge
de l’Uchiwa, étouffée par la surprise, émotion rapidement suivie par celle,
plus trouble, de l’excitation réprimée. Il vit les pupilles d’Hatake se
dilater, sentit les cuisses de l’homme frémirent sous ses paumes. Et devina
sans peine la progression des frissons jusqu’à un endroit autrement plus
sensible du guerrier fasciné qu’il tenait captif sous son regard. Les
sentiments de Kakashi avaient été mis à vif par les souffrances qu’il avait
endurées et la terreur à laquelle il avait dû faire face lors de sa récente
mission. Sa sensibilité exacerbée par le manque de sommeil et le délire léger
mais constant dans lequel il avait passé les derniers jours le laissait sans
protection devant un Sasuke que les années avaient rendu toujours plus
désirable et plus inaccessible et qui à présent se trouvait penché sur lui, son
torse tendu vers le sien, ses doigts enserrant doucement ses cuisses et ses
lèvres... Ses lèvres entrouvertes, ses lèvres humides... Ses mains qu’il
sentait glisser plus en amont, se rapprocher... Comme son visage... Comme
ses...
«C’est d’accord, on y va!»
La brusquerie de la déclaration
fit sursauter Sasuke. Il se redressa, un peu perdu, avec l’impression de sortir
d’un rêve. Oui, désagréable impression d’avoir perdu le contrôle pendant
quelques secondes.
«Je vais me changer et j’arrive.»
fit Kakashi en se levant prestement.
Plantant là pour la seconde fois
le dernier descendant des Uchiwa, glorieuse famille noble et respectée par tous
dans le village caché de Konoha et même au-delà, il se dépêcha vers sa chambre
et s’empressa de fermer la porte derrière lui avec toute la célérité qu’il
pouvait mettre dans ses actes sans que ceux-ci laissent penser à une fuite. Dans
le salon déserté, Sasuke se laissa tomber sur la chaise que son ancien
professeur venait de quitter et à son tour poussa un long soupir.
Posté
devant la glace, Kakashi arrangeait son bandeau. Il avait remplacé son T-shirt
par une chemise blanche propre et néanmoins froissée et mit le masque noir qui
épousait exactement les lignes du bas de son visage. Cependant, à la place de
l’habituel accessoire frontal dont il se servait pour cacher le sharingan, il
avait noué un foulard noir autour de son crâne. Soudain, une voix se fit
entendre derrière lui:
«Hep, patron! On dirait que tout
se passe bien avec le sale garnement! Z’êtes sur la bonne voie, faut foncer!
— Pakkun? Je ne vois pas de quoi
tu parles.
— Vous n’avez pas vu comment le
gamin vous fait du gringue? J’vous l’dis, z’êtes sur la bonne pente, y a pas
tortiller!» dit le chien en ponctuant sa phrase d’un clin d’œil complice et
égrillard.
Kakashi se tourna vers lui, les
épaules basses, la tristesse inscrite dans son attitude plus que dans son
visage dont on ne distinguait que l’œil droit.
«Pakkun, Sasuke agit comme ça
pour me réconforter, c’est tout.
— Vous rigolez? Vous avez vu la
façon dont il vous matait?
— Dans mon état, je doute qu’il y
ait grand-chose à “mater”.
— Mais enfin, patron, vous savez
bien que ce n’est pas le genre d’un Uchiwa de s’offrir à quelqu’un sous le coup
de la pitié. Vous connaissez assez le môme pour ça!
— J’ai fréquenté quelques Uchiwa,
oui. Suffisamment pour savoir qu’il vaut mieux éviter de leur tourner le dos. Une
famille trop lunatique. Soit, si ce n’est pas par égard à ma souff...
situation, c’est parce qu’il pense avoir une dette à payer envers moi. C’est
plus leur style, ça, tu ne trouves pas?
— Pourquoi vous vous obstinez à
nier l’évidence? Si j’ai bien compris toutes vos magouilles, vous en êtes au
point où vous lui devez quelque
chose, non?
— Il a pu se tromper dans le
compte.
— Pas un Uchiwa.
— De toute façon, rien ne se
passera aujourd’hui. Inutile donc de perdre notre temps en conversation futile.
— Et pourquoi ça?
— Allons, Pakkun, je te pensais
plus malin! Parce que j’ai autre chose de nettement plus pressant à faire que
d’avoir une discussion qui ne se conclura jamais.
— Vous m’avez très bien compris,
Kakashi-senseï.»
Le jounin fronça les sourcils
devant le ton sérieux qu’avait pris le toutou ninja. Lorsqu’il reprit la
parole, ce fut à voix basse et acérée:
«Mon équipe s’est faite
proprement charcuter, la majeure partie en est morte il y a, quoi, une semaine,
et tu voudrais que je batifole joyeusement avec un de mes anciens élèves après
l’avoir consciencieusement perverti?
— M’est avis qu’il ne vous a pas
attendu pour être perverti, le bambin.
— Pakkun!
— Kakashi-sama, vous m’avez
invoqué quand vous étiez là-bas, vous vous souvenez? J’ai vu de mes propres
yeux ce qui s’est passé. Et vous n’avez pas de honte à avoir d’être un peu
ébranlé. Votre respect pour vos équipiers morts est lui aussi tout à fait
honorable et compréhensible.
— Mais...?
— Mais ça fait un paquet d’années
maintenant que vous avez flashé sur le gosse. Et enfin, vous avez l’occasion de
faire une touche. Franchement, ce serait stupide de ne pas en profiter!
— Je te remercie pour ton avis
éclairé, Pakkun. À présent, file avant que je ne me souvienne à qui je dois le
fait que Sasuke-kun a découvert...
— Vos sentiments pour lui?
— Un moment d’égarement stupide
que je ne vivrai certainement pas une deuxième fois.»
En trois enjambées, l’homme fut
près de la porte.
«Y z’ont raison au village. Vous
êtes un lâche, patron.»
Kakashi stoppa net.
«C’est d’ailleurs pour ça que
vous lisez cette daube. Tant que ça reste dans vote tête, vous ne vous impliquez
pas, et comme ça, pas d’souffrance!»
Le ninja se retourna, le regard
glacial. Puis il afficha un grand sourire radieux.
«Allons, Pakkun, il ne faut pas
critiquer le Paradis du batifolage! Je
t’assure que c’est une bonne série. Tiens, profite de mon absence pour en
feuilleter un exemplaire, je te parie que tu vas aimer! Quant au reste — sa
voix se fit plus froide — cela ne regarde que moi. Ma vie est la propriété du
village de Konoha, mais il m’appartient encore de décider de quelle manière je
souhaite la mener. Et je n’aime pas avoir quelqu’un continuellement dans mes
pieds. À bon entendeur...»
Sur ce, il alla rejoindre le
ténébreux jounin.
Les
deux ninjas se tenaient près de la stèle mémorielle où tant de noms se
trouvaient gravés. Recueillis, le front bas, chacun suivait le cours de ses
pensées dans la lumière décroissante du couchant. Kakashi détaillait un par un
le visage de ses compagnons morts, les faisant mentalement défiler en une
farandole sinistre et mortuaire. Sasuke se demandait comment diable renouer le
dialogue. Mais pourquoi était-ce lui que les deux autres boulets avaient
envoyé? Leur lourdeur était une preuve suffisante de leur bagout! Dans le
domaine de la conversation, il ne pouvait que s’incliner devant eux. Victoire
qu’il leur laissait d’ailleurs bien volontiers... À force de fixer le mémorial,
une idée lui vint.
«Kakashi, vous souvenez-vous de
ce que vous nous avez dit lors de l’épreuve des deux clochettes?
— Humm?
— “Les noms gravés sur cette
stèle sont ceux de valeureux ninjas qui sont considérés comme des héros dans le
village.” La mort fait partie inhérente du statut de ninja. Chacun d’entre nous
le sait. Vous-même nous l’avez appris dès notre première leçon.
— Il y a une différence entre une
mort inévitable et le massacre qui a eu lieu en raison d’une erreur de
jugement, Sasuke! À cause de ce ninja, d’un seul ninja, une douzaine d’hommes
de bien ont été tués. Qui donc pourrait pardonner à cette personne, et comment?
— Vous parlez de l’Hokage? Mais
Hokage-sama n’a jamais voulu ce qui est arrivé! Si la situation avait été
portée à sa connaissance...
— Je ne parle pas de l’Hokage! Je
suis parfaitement instruit de ses opinions à ce sujet.
— Mais alors...?»
Ces paroles restèrent suspendues
dans les airs et s’enfuirent avec les derniers rayons du soleil. Hatake fit
face au jeune homme, portant dans son regard la blessure aiguë qui empoisonnait
son âme et sa conscience. Malgré lui et comme tant d’autres fois, il remarqua
que la beauté du jeune éphèbe se révélait pleinement au crépuscule, en écho
charnel à celle de la lune. L’astre pale répandait sa lumière blanche sur le
visage de cette fleur sombre qui avait grandi solitaire dans les ténèbres
familiales du sang versé. La peau exsangue contrastait durement avec la
chevelure de jais. Sasuke avait des cheveux magnifiques, fins et forts à la
fois. Cependant, il les portait courts, hormis les quelques mèches dont le
balancement masquait régulièrement ses yeux étranges. Sans doute qu’un matin le
jeune homme s’était rendu compte de ce que Kakashi avait depuis longtemps
remarqué. Le charme taciturne des Uchiwa ne se modifiait guère d’un membre à
l’autre. Sans doute qu’un matin le garçon s’était rendu compte que le miroir
lui renvoyait l’image maudite de son frère damné.
Mais à cet instant, si l’expression
du jounin pouvait recevoir nombre d’épithètes, celles de “familière” ou d’
“habituelle” étaient à bannir. Sasuke laissait voir sa surprise comme il avait
rarement exprimé un quelconque sentiment qui pouvait être interprété à son
détriment.
«Kakashi-san...»
La particule et le ton grave du
jounin montraient son sérieux et le changement qui s’était opéré dans son
attitude renforçait l’aura de gravité qu’il dégageait.
«L’Hokage le sait. Je lui ai dit.
Je ne pousse pas la bêtise jusqu’à la traîtrise en dissimulant des
informations. Ni jusqu’à la lâcheté.
— Peu m’importe l’Hokage! Kakashi,
ne me dites pas que vous vous sentez entièrement responsable de ce qui s’est
passé là-bas?
— Non. Je ne m’en sens pas
responsable.
— Dans ce cas...
— Je le suis.»
L’Uchiwa l’envoya à terre
d’un brusque coup de poing. En
percutant le sol, l’ancien professeur eut la pensée incongrue que son élève
avait bien progressé: il ne l’avait même pas vu venir, celui-là!
«Ne dites plus jamais ça.»
La voix sifflait, menaçante, en
parfaite adéquation avec la silhouette inquiétante qui se découpait parmi les
étoiles.
«Un homme seul ne peut être
responsable d’un mauvais coup du sort! Vous les avez forcés à vous suivre ou
ils ont adhéré de plein gré à votre plan?
— Là n’est pas la question...
— Ils pensaient donc que l’idée
n’était pas mauvaise. Ils se sont trompés tout comme vous. Ils sont
responsables de ce qui leur est arrivé au même titre que vous.
— Je ne suis pas mort.
— Et c’est pour cette raison que
vous vous en voulez?
— Ils se sont faits tuer sur mes
indications. J’aurais dû être le premier à payer mon incompétence.
— Mais la vie n’est pas juste. C’est
même pour cela qu’existent les ninjas. Toujours est-il que vous êtes vivant.
— Je me suis enfui.
— En sauvant deux d’entre eux!
— Je les ai récupérés à la
lisière...
— Vous seriez mort inutilement si
vous vous étiez attardé!
— Comment le savoir? Pourquoi
t’en montres-tu si sûr?
— Parce qu’on m’a envoyé sur
suffisamment de missions suicides pour que je sache comment ça se passe.»
Kakashi baissa la tête. Sasuke
s’approcha et lui tendit la main. Le jounin aux cheveux gris la saisit et se
leva. Debout, il se rendit compte que son torse n’était séparé de celui du
jeune brun que de quelques centimètres seulement. Et leur visage d’autant...
Le souffle tentateur de Sasuke
sur ses lèvres...
La main hésitante de Kakashi dans
la sienne...
«Et
bien, Sasuke-kun! On peut dire que tu as bien grandi, fit Hatake en reculant
d’un pas.
— Il est rare de vivre une vie de
ninja sans que celle-ci ne vous oblige à mûrir» répondit prudemment l’Uchiwa
tout en dissimulant son dépit.
Il se tourna vers la stèle.
«Il y a là gravés des noms
d’anciens équipiers à moi. Je ne pouvais pas en supporter la plupart, mais j’en
appréciais quelques uns. Je leur ai survécu. Beaucoup avaient une famille. Je
ne prétends pas que ce soit juste ou mérité. Mais je constate ce fait et je
m’en accommode. Je vis et pas eux. Alors autant profiter de cette chance. La
gâcher serait à mon sens désavouer le bonheur d’être vivant et nier non seulement
ce pour quoi ils se sont battus, mais aussi la douleur de leur décès pour ceux
qu’ils étaient et pour ceux à qui ils manquent. Votre réaction à mon sens ne
fait pas honneur à leur mémoire. Ou plus exactement, si elle leur fait honneur,
elle ne leur rend pas justice. Puisque vous êtes encore parmi nous, sur cette
terre, vivez la vie qu’ils auraient aimé vivre. Le genre de vie qui vaut la
peine d’être vécue.»
Hatake avait ouvert plusieurs
fois la bouche durant la tirade du jeune homme. Maintenant que l’Uchiwa s’était
tu, il n’osait plus prononcer la moindre parole. Il sentait la justesse d’un
tel raisonnement. Néanmoins, celui-ci ne le convainquait pas entièrement. Une
seule réplique convenait à la situation tout en le sortant de l’embarras et
sans pour autant l’engager.
«Merci, Sasuke.»
Le sombre jounin frissonna, les
yeux toujours fixés sur le mémorial.
«Vous n’adhérez pas à un seul
fragment de ces idées, n’est-ce pas?»
L’homme s’approcha de lui d’un
pas traînant, les mains dans les poches. Il s’arrêta suffisamment près pour que
Sasuke sente son souffle lui chatouiller la nuque.
«Tu l’as dit toi-même: “Là n’est
pas la question.”»
Le ninja brun poussa un soupir
d’abandon. Subitement, il perçut dans son dos le regard de son ancien
professeur. Il apposait le long de sa colonne une brûlure révélatrice de
l’attention soutenue que l’homme lui portait. Sasuke pouvait distinguer le
déplacement de la pupille, ses tours et détours, tout à la fois examen critique
de son corps et artifices pitoyables ayant pour but de retarder l’inévitable
destination de cette observation affamée. Le jeune guerrier frémit sous cette
volupté ardente et immatérielle. Le désir qu’il avait éprouvé une heure plus
tôt se rappela à son bon vouloir. Il lui sembla que de l’électricité circulait
entre leur deux corps, les liant l’un à l’autre, les poussant à se rapprocher
de la même manière que s’attirent les deux pôles d’un aimant. Certitude
qu’inexorablement, en dépit de toute volonté, la peau des deux hommes finirait
par se toucher. Enfin, l’œil avide se posa sur ses hanches et, après une
hésitation ultime, glissa d’un cran. Sasuke entendit le jounin manquer une
respiration et gémir, à la lisière de l’audible. Ce simple son provoqua en lui
un vertige. Puis une chaleur soudaine enflamma en son bas-ventre. Il devina le
mouvement irrépressible qu’amorçait le bassin du jounin derrière lui. Son
excitation monta brutalement et de l’amadou se répandit dans ses veines, ne
demandant qu’à être allumé. Mais brusquement, sans que rien ne le laisse
prévoir, son ancien professeur poussa une soupir qui vint enrober son cou d’une
caresse et se détourna de lui. À défaut d’une douche froide, Kakashi avait
décidé de s’abîmer dans la contemplation du ciel nocturne. La tête en arrière,
il tentait désespérément d’oublier la proximité du jeune homme, déchiré entre
le besoin de l’enlacer et celui de s’éloigner s’il voulait résister à cette
tentation. Sasuke ne parlait plus, ne bougeait plus. Sa respiration indiquait
qu’il attendait passivement que quelque chose advienne. Et quelque chose
arriva. Pakkun.
Tout à coup, Hatake se reçut une
boule de type canidé à poils ras dans les fesses. Le choc le jetta sur le
dernier des Uchiwa, que tout l’entraînement de celui-ci n’avait pas préparé à
l’inattendu d’une attaque directe de la part d’un partenaire aussi timoré. Le
beau brun ténébreux se retrouva donc avec le tout autant bishônen Hatake sur le
dos. En gros, le sens propre rejoignait le figuré. Kakashi s’appuya sur son
coude et, relevant la tête, débuta sur un ton monocorde et d’un désintérêt
total la longue liste d’insultes que toute personne vivant en compagnie d’un
chien de tempérament espiègle se doit d’avoir en réserve. Puis il réalisa que
Sasuke, lui, ne réagissait pas. Et en comprit la raison quand il s’aperçut
qu’il avait le bassin plaqué contre le postérieur du jounin, au demeurant
mœlleux bien que musclé et d’une chaleur agréable. Enfin, il s’aperçut que si
son esprit ne s’était rendu compte que tardivement de sa position plus
qu’ambiguë, son corps n’avait pas mis autant de temps. Confus, il posa sa main
au sol dans le but de se relever quand une poigne le saisit.
Sasuke savourait le contact de
son ancien maître contre lui, et peu lui importait la cause de ce soudain
rapprochement. Qu’il ait redressé son torse avait rapproché les parties de leur
anatomie se trouvant sous la ceinture et il ne pouvait plus douter du désir que
chacun éprouvait pour l’autre. Il se mordit les lèvres et réfréna l’envie de se
frotter contre lui. Apparemment, le grand amateur de lectures interdites aux
moins de dix-huit ans avait un problème dès qu’il s’agissait de passer à la
pratique. Mieux valait ne pas l’effrayer. C’est alors que le dit amateur cessa
son discours monotone et se figea. L’Uchiwa se prépara à agir. Il attrapa le
poignet du fuyard et pivota, se retrouvant face à face avec lui.
Kakashi
et les étoiles autour. Sasuke allongé dans l’herbe. Leurs bras les séparaient.
«Sasuke, je...»
De sa main libre, le nommé
agrippa les cheveux de l’homme qui le surplombait et l’attira à lui. Ses lèvres
se posèrent sur le tissu noir du masque, barrière irritante aux projets du
jeune ninja. Le temps qu’il s’occupe de ce problème à sa manière, le jounin
aurait toute latitude pour s’échapper. Encore. Alors Sasuke entoura ses jambes
autour des siennes et libéra sa première main pour accrocher le pantalon au
niveau de la taille, profitant du geste pour caresser brièvement le creux de
ses reins. Kakashi sursauta. Doucement, du bout des lèvres, le ténébreux ninja
entreprit d’ôter l’obstacle susdit. Comme il le faisait glisser, sa peau
effleura celle du jounin qui hésitait entre le rouge de la confusion et la
paleur de l’angoisse. Enfin le visage se trouva complètement dévoilé. Le
masque, désormais inutile, enserrait la gorge du jounin. Hatake retrouva soudain
la faculté de parler.
«Arrête maintenant! Je s...»
Hélas pour lui, mauvais timing:
Sasuke profita de ce qu’il avait la bouche ouverte pour y glisser sa langue. Un
bon ninja apprend à saisir toutes les opportunités qui se présentent à lui, et
il ne pouvait vraiment pas manquer celle-ci. Kakashi se raidit. Le muscle
humide de l’Uchiwa l’explorait et caressait le sien. Il sentit son désir monter
et celui, pressé contre son aine, de son ancien élève n’était pas là pour
calmer son ardeur. L’ex-anbu dut faire appel à toute la maîtrise qu’il avait
acquis sur son corps au fil des années pour ne pas répondre à l’enthousiasme du
beau brun. Il mobilisa toutes ses facultés sans plus réfléchir au pourquoi de
son refus, se disant que s’il en avait décidé ainsi un jour, c’est qu’il devait
bien avoir une raison valable. Voyant son partenaire s’abstenir de toute
réaction, Sasuke en profita pour lui enlever aussi le foulard qui cachait son
œil gauche. Lorsqu’il sentit une main défaire le nœud de son bandeau, le jounin
aux cheveux gris s’agita.
That’s all folks!
niak niak niak...
La suite dès que je l’aurai
écrite!!!
Petit délire de l’auteur:
En fait, vous auriez dû avoir
droit à deux pages de plus. Je les avais tapées, emballé c’est pesé, et tout et
tout... Mais pourquoi donc n’y sont-elles po, me demanderez-vous? (à moins que
vous soyez partis dès la fin de la fic, ou en train de mettre votre manteau
pour vous tirer paske
ce-kelle-racont-la-ptite-dame-c’est-pas-que-ça-nous-emme***-mais-bon...)
Tout simplement parce que j’avais
fini de les taper à trois heures du mat’ (un bâillon sur leur bouche pour pas
réveiller les voisins) et qu’au moment où je vire l’application, j’avais déjà
baissé l’écran (ordi portable) que j’ai fermé dès qu’il fut noir. Oui mais
voilà, cinq minutes plus tard j’ai bondi de mon lit et courut jusqu’à Lord
Macintosh pour l’ouvrir précipitamment: j’avais omis d’enregistrer ce que
j’avais tapé... Trois heures de tripotage cérébral parties en fumée, je peux
vous dire que j’étais dégoûtée...
Bref, je me dépêche de conclure
cette fic, d’autant plus que je dois à côté me concentrer sur mes partiels
(enfin, ça c’est ce que je suis censée faire...)
Merci de m’avoir lu!!!
See you soon!